Liliane Tellier, née Rainbeaud avait 10 ans le 18 avril 1944. Elle habitait avec sa famille au 32 rue Anatole France et fréquentait l’école Cottereau.
« La première bombe est tombée à l’angle de la rue Anatole France et de la rue Hélène. Mon père était journaliste/photographe de presse comme il ne voulait pas travailler pour les Allemands, il avait trouvé un petit boulot à la gare. Il y a eu l’alerte et il a regagné la maison en vitesse. Il a trouvé ma mère sur le pas de la porte, avec ses 2 filles, un peu désemparée. Nous sommes descendus dans la cave et là le bombardement à vraiment commencé. Dans la cave, avec mes parents et ma sœur Jacqueline, il y avait des amis qui habitaient avenue de Rosny et qui étaient venus se réfugier là en pensant que c’était plus sûr. J’ai prié le bon Dieu pendant tout le bombardement. Cela m’a paru très long. Ma sœur, elle, a dormi pendant tout le bombardement.
Les pompiers nous ont aidé à sortir de la cave et nous ont emmené rue Béthisy. En passant devant l’actuelle Galerie, il y avait un trou immense. C’est là que j’ai eu peur. Il y avait des gens en sang sur des civières. Je ne sais combien de temps nous sommes restés là. Puis nous sommes partis à pied à Pantin. Il y avait, près de la pharmacie place Jeanne d’Arc, un hôtel en feu. Çà pétait de partout. On était en chemise de nuit et en chaussons. Nous avons été accueillis dans un premier temps chez des amis à Pantin puis dans la famille de ma mère à Paris.
La maison a sauté après à cause d’une bombe à retardement. Il a eu beaucoup de bombes à retardement. Mes parents sont revenus à Noisy pour récupérer quelques affaires dans les ruines. On a vécu à Noisy dans un vieux pavillon délabré, c’est tout ce que mes parents avaient trouvé mais c’était déjà çà.
On a vécu là alors que ma mère attendait mon petit frère. Ma mère a été voir le maire et a fait un scandale pour obtenir un relogement dans les maisons préfabriquées. On a eu un pavillon tout meublé, tapis, rideaux. C’était une maison américaine au 10 avenue du Général Leclerc, c’était beau ! Au numéro 7, en face, il y avait une maison française et là habitait la famille Tellier et c’est comme çà que j’ai connu mon mari. »
La photo : Liliane (au premier plan à droite, accroupie) n’en a aucun souvenir. C’est une mise en scène de son père André journaliste-photographe. Une seule certitude, nus sommes à Noisy… si quelqu’un à des infos…
propos recueillis par Anne-Marie Winkopp, le 21 mars 2024 à la maison de retraite st Antoine, Noisy-le-Sec